BANDE1, subst. fém.
A.? Usuel
1. Morceau de papier, de tissu, etc., long et étroit, qui sert à couvrir, à protéger, à maintenir, à serrer, à border ou à orner quelque chose : 1. Tous portaient une bande de toile blanche passée sur l'épaule droite, c'était le signe et la couleur des Armagnacs; comme le chaperon bleu, la croix de Saint-André, avec la fleur de lis au milieu, étaient la marque du parti des Bourguignons.
Barante, Hist. des ducs de Bourgogne,t. 3, 1824, p. 179.
2. Puis, tirant d'une armoire quantité de vieux linge, elle se mit à le couper pour faire des bandes et de la charpie.
Mérimée, Colomba,1840, p. 146.
SYNT. Bande de gaze, de papier; bande collée, compressive, élastique, métallique, molletière, tricolore, velpeau; casquette à bande rouge; découper, rouler des bandes pour les pansements.
2. Spécialement
a) PRESSE. Déchirer, faire sauter la bande d'un journal; mettre, recevoir un journal sous bande.
b) SPECTACLES : 3. As-tu lu ma préface? Je te l'envoie sous bande à tout risque.
Lamartine, Correspondance,1836, p. 43.
? Coller, mettre une bande sur l'affiche du théâtre. Annuler un spectacle.
B.? P. anal.
1. Tout objet ou espace dont la forme allongée et étroite rappelle celle d'une bande : 4. ... ils foulaient un sentier de quatre pieds de largeur à peine, séparé du précipice au bas duquel la mer rugissait par une étroite bande de gazon et de plantes parasites poussées dans les anfractuosités de la falaise.
Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 648.
SYNT. Bande jaune, lumineuse; une bande alluviale, frontière, littorale; une bande de brouillard, de ciel, de feu, de forêt, de mer, de terrain, de verdure; une bande de châtaigniers, de sapins; les bandes du tigre; le tatou à dix bandes; immeuble en bande.
?
P. métaph. : 5. ... le souvenir des quatre soirs écoulés depuis le départ d'Albertine (...) quatre soirs déjà faisant une bande de souvenirs bien mince à côté de l'autre, mais que chaque jour qui s'écoulerait allait peut-être étoffer.
Proust, La Fugitive,1922, p. 449.
2. Spécialement
a) JEUX ?
En partic. Les quatre bandes d'un billard. Les côtés intérieurs. ?
Au fig. Par la bande. Indirectement, de biais, allusivement : 6. ... c'est toi qui me montres (...) que j'ai touché la corde sensible. C'est ce que nous nommons agir par bande, métaphore prise au jeu de billard (...) agir par bande, c'est mettre en jeu la passion que l'on connaît à quelqu'un au lieu de lui demander directement.
Stendhal, Correspondance,t. 1, 1842, p. 261.
7. Pour nous, nous ne voyons aucun inconvénient à ce que Corneille ait traité l'illustre légende « par la bande » : c'est la manière même de Jean Giraudoux. Il s'agit beaucoup moins d'?dipe, dans ce conte dramatique, en marge de Sophocle, que de Dircé (...). À la fin seulement, car il le faut bien, nous rejoignons le vieux mythe.
Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 359.
b) Techn. diverses ? ARCHIT. ,,Les parties plates des architraves, chambranles, impostes et archivoltes`` (Bach.-Dez. 1882). ,,Bande de languette, de linteau, de trémie`` (Chabat1881).
?
ARM. Dispositif d'assemblage dans les armes automatiques. Une bande de mitrailleuse; tirer une bande; une arme à bande, (à chargeur) : 8. Le pointeur était tombé sur le côté, tué sans doute; c'était le servant qui avait crié. Il tirait balle par balle la bande engagée.
Malraux, La Condition humaine,1933, p. 382.
?
CIN. Synon. de film.,,Terme qui désigne la pellicule surtout au stade du montage. On l'emploie aussi au figuré, avec le sens de pièce cinématographique`` (O. Uren, Le Vocab. du cin. fr., Fr. mod., juill. 1952, p. 202). Bande-dialogue, bande sonore. ? En partic. Bande internationale. ,,Bande sonore d'un film ne comportant aucune parole, mais uniquement la musique et les effets sonores`` (Cham. 1969). Bande dessinée, synon. de dessin animé*. P. ext. [Dans les albums, dans les journaux, etc.] Séquence d'images, avec ou sans texte, relatant une action au cours de laquelle les personnages types sont les héros d'une suite à épisodes (bande feuilleton), (ex. : Bécassine, les Pieds-Nickelés, Tintin, Astérix, Lucky Luke, les Dalton, etc.).
? Péj. Les rois de la bande. ,,Les industriels du film`` (Giraud 1956).
? ÉLECTRON. Bande magnétique. ,,En informatique, bande souple de matière plastique ou de métal revêtue d'une matière magnétisable sur laquelle peuvent être disposés des spots (taches) aimantés représentant l'information. La bande magnétique est généralement à sept, huit ou neuf voies (ou pistes)`` (Baudhuin 1968). Bande perforée. ,,Ruban de papier (ou de matière plastique) perforé selon une disposition codifiée des trous appropriés à la transmission de l'information. On dit aussi ruban perforé`` (Électron. 1959).
? HÉRALD. Pièce honorable qui traverse l'écu de l'angle dextre du chef à l'angle sénestre de la pointe.
? RADIO-ÉLECTR., TÉLÉV. Bande de fréquence. ,,Zone plus ou moins large du spectre hertzien`` (Neyron 1970). Bande magnétoscopique. ,,Bande magnétique sur laquelle sont enregistrées les images de la télévision`` (Neyron 1970).
?
MÉCAN. (cf. bander B). Tension d'un ressort quelconque : 9. On donne aux ressorts de choc et de traction une bande, c'est-à-dire une tension initiale, qu'on augmente (...) pour avoir la bande d'attelage; ...
Ch. Bricka, Cours de ch. de fer,t. 2, 1894, p. 19.
PRONONC. : [b?
?:d]. Enq. : /ba?d/.
ÉTYMOL. ET HIST. ? 1100-50 bende « pièce de métal en forme de cercle, anneau » (Pelerinage Charlemagne, éd. Koschwitz-Thurau, 201 dans T.-L. : A granz bendes d'argent l'a fait leier menut); av. 1150 « cercle, cerceau servant à renforcer qqc. » (Antioche, éd. P. Paris, II, 296, ibid. : Il le [l'engien] dolent et drescent, gentemnt le garenisent, Les bendes sont de fer et roides les chevilles); 1165-70 bande « long morceau d'étoffe servant à panser une blessure » (Chr. de Troyes, Erec et Enide, éd. W. Foerster, 3925, ibid. : Chascuns des panz de sa chemise Trancha bandes longues et lees, S'ont lor plaies antrebandees); ca 1175 hérald. (Id., Perceval, éd. W. Roach 4752 : Un escu d'or, et en l'escu Une bende ot qui d'azur fu).
Empr. au germ. *bindo?- « bande ruban » que l'on peut déduire de l'a. h. all. bintan (all. mod. binden), got., a. sax., ags. bindan a. nord. binda « lier », mot à rattacher à la racine i.-e. *bhendh- « lier » (Kluge20; IEW t. 1, p. 127). L'hyp. d'un empr. anc. au germ. est confirmée par l'ancienneté du mot dans les lang. rom. : a. prov. benda, xiies. (Rayn.), ital. benda, xiiies. (DEI), de même lat. médiév. binda, domaine ital., xiiies. (Salimbene, Richard de San Germano dans Mittellat. W. s.v.), esp. venda (dér. vendar « bander », xiiies. dans Cor.); aussi est-elle préférable à celle d'un empr. au frq. (EWFS2). D'apr. Brüch, p. 98, le terme serait issu du commerce de la fourrure importée dans la Romania par des marchands romains qui auraient trafiqué en Germanie.
BBG. ? Gottsch. Redens. 1930, p. 300.
BANDE2, subst. fém.
A.? Courant
1. Groupe de plusieurs personnes rassemblées pour un but précis : 1. Je ne sais si le livre de Cicéron sur l'amitié a fait de grands amis; mais la bande sacrée des jeunes Thébains, formée par Pélopidas, en renfermait un bon nombre, qui, après avoir vécu dans la plus parfaite union, périrent tous ensemble le visage tourné vers l'ennemi.
Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 310.
2. ? Tiens, dit l'Évêque, j'y songe. Vous avez raison. Je puis les [les brigands] rencontrer. Eux aussi doivent avoir besoin qu'on leur parle du bon Dieu. ? Monseigneur! Mais c'est une bande! C'est un troupeau de loups!
Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 37.
3. « Homme étonnant! » pensait Jerphanion. « Ce qu'il ferait bien dans ma bande du Meygal! ... Encore deux ou trois ans, et quelques déchirements de plus (...) ce sera seulement un homme de bande, un compagnon. »
Romains, Les Hommes de bonne volonté,Verdun, 1938, p. 130.
SYNT. Bande de cavaliers, d'insurgés, de patriotes, de pirates; une bande furieuse, redoutable; bandes rivales; chef de bande; enrôler qqn dans sa bande; se mettre en bande; mener, organiser, recruter une bande; faire partie d'une bande.
2. En partic.
a) Vx, et souvent péj. Groupe d'hommes armés, rangés sous la même bannière, guerroyant de façon régulière ou non. Bande armée; la bande des Armagnacs : 4. En outre, des compagnies de gens de guerre, formées d'hommes de toute nation et de tout état, désolaient la France par leurs brigandages. (...) ces bandes aimaient mieux guerroyer pour le pillage et sans discipline : elles se trouvaient si bien en France, qu'elles la nommaient leur chambre.
Barante, Hist. des ducs de Bourgogne,t. 1, 1824, p. 110.
5. La Grèce ne fut jamais au point de ruine et de désolation où nous la trouvons. C'est un champ de bataille, de massacres et de pillage universel. Il y a autant d'armées ou plutôt de bandes qu'il y a de villages.
Lamartine, Correspondance,1832, p. 293.
SYNT. Bande d'assassins, de chenapans, d'enragés, de gangsters, de pillards, de scélérats.
b) Péj. [Comme 1erterme d'un syntagme exprimant une injure adressée à un groupe de pers.] Bande d'andouilles, de cinglés, de feignants, d'idiots, de salauds, de vaches : 6. ? Eh bien? Qu'elle leur dit ... Qu'est-ce que vous avez? ... Bande de paumés! Bande de saindoux! Vous êtes que des sales morveux! Allez-vous-en vous gratter! Malfrins! Cressons!
Céline, Mort à crédit,1936, p. 530.
B.? P. ext., non péj.
1. Groupe étroitement uni de personnes réunies par des goûts communs pour des motifs divers : 7. À propos d'un article de Lemaître sur Anatole France dans le Figaro, Daudet me disait : « C'est bien de la bande de Renan, une bande d'érudits à l'érudition un peu fanée, mais avec un grain de poésie.
E. et J. de Goncourt, Journal,1889, p. 1015.
8. le malade. ? Et vous n'êtes pas un vrai malade, hein! Vous faites partie, en quelque sorte, de la bande.
Il fait signe vers le monde du dehors.
corte. ? De quelle bande?
le malade. ? La bande, la maffia, la sainte compagnie de ceux qui vivent dehors, la clique des gens en bonne santé.
Camus, Un Cas intéressant,adapté de D. Buzzati, 1955, 2etemps, 9etabl., p. 696.
SYNT. Bande d'amis, de comédiens, d'étudiants, de jongleurs, de touristes; une joyeuse bande; une bande d'une douzaine; la petite bande des amis; la bande de qqn (fam. à) : la bande à Bébert, à Bonnot; le plus bavard, le plus courageux de la bande; aller quelque part en bande, être de la même bande; faire bande à part.
2. Spécialement ?
MUS. Réunion, ensemble, compagnie de musiciens formant un orchestre : 9. Si tu sens sur toi des regards soupçonneux, sors une expression de Québec, appelle un orchestre une bande, un wagon-restaurant un char réfectoire.
Giraudoux, Siegfried et le Limousin,1922, p. 31.
10. Comme j'attaquais la rue solitaire, les premières mesures du jazze-bande furent attaquées aussi, avec une violence incroyable.
Jouve, La Scène capitale,1935, p. 48.
? SOCIOL. ,,Groupe d'individus, le plus souvent non intégrés à leur milieu socio-familial, dont l'âge moyen est 16 ans et demi`` (Mucch. Sc. soc. 1969). Les bandes de jeunes; ,,la plupart des auteurs voient dans la bande une réponse à un système social désorganisé`` (Sociol.1970, s.v. gang).
C.? P. anal. [En parlant d'animaux] Bande de brochets, de canards, d'étourneaux, de loups, de rats, de sarcelles.
PRONONC. ? Cf. bande1.
ÉTYMOL. ET HIST. ? 1. 1360 milit. « réunion de soldats » (Froiss., Chron., III, 132 dans Gdf. Compl. : Des bendes de Normandie et de Bretagne); xves. bande (Comm., IV, 11, ibid.); 1601, 24 déc. [le syntagme ne se trouve pas dans Est. 1549 comme l'indique le FEW t. 151, p. 53 b] faire bande à part « marcher séparément » (Lett. miss. de Henri IV, t. V, p. 518, ibid. : Ils ont descouvert leur but, duquel plusieurs affectionnez a la religion catholique sont si scandalisez qu'ils ont commencé a faire bande a part); av. 1597 chef de bande « tribun militaire » (Amyot, Paul Emile, 20 dans Hug.); 2. a) p. anal. bende 1509 « réunion de personnes » (Lemaire de Belges, Illustr., I, 44, ibid. : Le Roy et la Royne, et tous les nobles de Troye, convoyerent Polymnestor Roy de Thrace et de Bistonie, avec madame Ilione sa compaigne, et toute sa bende, jusques au port de Sigee); 1669 spéc. Grand[e] bande « les 24 violons de la Chambre du Roi » (Molière, Tartuffe, collect. Bordas, II, 3, p. 57 : Là, dans le carnaval, vous pourrez espérer Le bal et la grand-bande, à savoir deux musettes); b) 1690 bande de bohémiens « bande malfaisante » (Fur.); 1718 bande de voleurs (Ac.); 1835 bande de maraudeurs, de brigands (Ac.); 3. 1468 « parti, faction » (K. Heilemann, Der Wortschatz von G. Chastellain nach seiner Chronik, Leipzig, Paris, 1937, p. 238 : J'ai volontiers nourri paix en ma maison, enchassé division où j'ai pu rompuz bandes et complu à deux laz); 1694 [être] d'une autre bande (Ac.); Ac. 1835 ,,Dans ce sens, on ne l'emploie guère que par une sorte de dénigrement.``
Empr. à l'a. prov. banda « troupe, compagnie de gens » (fin xives. dans Rayn.), d'orig. germ. dont la voie de pénétration est difficile à préciser ? ou bien issu du got. ? soit bandwo « signe » attesté sous la forme bandum au sens de « étendard, bannière » en lat. médiév., ca 675, Julian., Hist. Wambae, c. 16, Scr. rer. Merov., V, p. 516 dans Nierm. (le prov. étant en ce cas issu du plur. banda devenu fém. sing.) ? soit bandwa « id. » (Feist); ou bien issu du germ. *banda « id. » (Brüch, p. 58, 102), le mot étant anc. dans l'ensemble des lang. rom. (v. FEW t. 151, p. 56). Le sens de « troupe » est issu de celui de « troupe assemblée sous un étendard », lui-même emploi méton. de bandum « étendard ». L'hyp. d'un empr. au corresp. ital. banda « corps de troupe distingué par son fanion » (Brunot t. 1, p. 510; DG; DEI, s.v. bandiera; REW3, no929; Dauzat70) attesté seulement dep. le xvies. (Machiavel [1469-1527] dans Batt.) n'est pas satisfaisante du point de vue chronologique.
BBG. ? Duch. 1967, § 60.
BANDE3, subst. fém.
MAR. ,,Inclinaison permanente que prend un navire sous l'effet d'un fort vent transversal, ou par suite d'un déséquilibre dû à la répartition des poids à bord, par exemple à la suite d'un ripage de la cargaison ou d'une entrée d'eau`` (Le Clère 1960). Avoir, prendre une bande de 10 degrés; donner de la bande (
cf. abattée ex. 2) :
Il était temps; l'ordre n'était pas exécuté que le vent était à nos trousses et que le bâtiment donnait de la bande.
A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 353.
? En partic. Mettre l'équipage à la bande. Le disposer sur le pont, le long des lisses, pour rendre les honneurs (cf. Le Clère 1960).
Prononc. : [b?
?:d]. Enq. : /ba?d/. Étymol. et Hist. Fin xives. mar. « bord, côte » (Froissart, Chron. t. XI, pp. 185-186 (S. H. F.) dans Jal2: En mouvant des Harflues en venant toutes les bendes et les costières de mer jusques à l'Escluse); 1402 id. « côté [du sud] » (J. de Béthencourt, Découverte des Canaries, ibid. : Et allasmes chercher notre bonne aventure au long de la coste de la Bande du sud); 1515-22 « côté d'un vaisseau » (Ant. de Conflans, Faits de la marine, éd. Jal, Annal. marit. 1842, ibid.); p. ext. 1773 « inclinaison transversale d'un navire » (Bourdé de Villehuet, Manuel des marins ou Explication des termes de mar. : Un vaisseau donne la Bande quand il incline sur le côté, en portant trop de voiles, ou lorsque le vent est très fort). Empr. à l'a. prov. banda « bord, lisière (d'une forêt) » (début xives., Vie de S. Honorat dans Rayn.), « côté » Pt Lévy (E.); en a. prov., ce sens est donné par Bl.-W.5comme issu de celui de « troupe, bande » (xives. Chronique des Albigeois, col. 53 dans Rayn.) par l'intermédiaire de « parti, côté » mais plus prob. empr. à l'a. fr. bende « pièce, frange étroite » (bande1*), v. EWFS2.
STAT. ? Bande1, 2, 3. Fréq. abs. littér. : 3 325. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 481, b) 8 017; xxes. : a) 5 866, b) 4 194.